19 Mai La SSJB rejette 505 membres potentiels: Boucher réplique par une mise en demeure
JACYNTHE NADEAU – La Tribune – 19 mai 2017
– Quelques jours après avoir refusé l’accès à son assemblée générale annuelle à une trentaine de membres potentiels, la Société Saint-Jean-Baptiste du diocèse de Sherbrooke a rejeté les 505 demandes de membrariat déposées le mois dernier par le président de la Société nationale de l’Estrie Étienne-Alexis Boucher.
Les deux parties se parlent désormais par avocat interposé puisque M. Boucher a envoyé une mise en demeure à la SSJB la sommant de reconnaître ces gens comme des membres en règle et de leur émettre une carte de membre.
«À défaut, nous exigeons que vous nous fassiez parvenir par écrit les raisons pour lesquelles nos clients sont refusés», ajoute l’avocat d’Étienne-Alexis Boucher et des 505 personnes, dans ce document daté du 5 mai dernier.
Dans sa réponse, la SSJB invoque plusieurs arguments pour expliquer sa décision, dont le fait « qu’il n’y a aucune disposition législative créant le droit pour une personne de devenir membre d’une corporation sans but lucratif ».
L’organisme qui se déclare apolitique fait également valoir qu’il ne s’agit pas de demande d’adhésion personnelle ou individuelle, puisque « aucune de ces personnes n’a personnellement demandé son adhésion et n’a personnellement demandé un formulaire à cet effet »; que l’initiative « semble patronnée par la Société nationale de l’Estrie et la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal » et que ces deux organismes ne semblent pas apolitiques.
« La Société (Saint-Jean-Baptiste du diocèse de Sherbrooke) est aussi indépendante et autonome de toute autre Société Saint-Jean-Baptiste. (Et) l’initiative des deux organismes précités laisse craindre une atteinte à cette autonomie », ajoute l’avocat de la SSJB.
Il est par ailleurs précisé dans ce document que des demandes d’adhésion ont été faites par des personnes déjà membres, que les adresses indiquées sur certaines demandes sont erronées et que des demandes ne portent pas de signature.
En entrevue avec La Tribune, Étienne-Alexis Boucher s’insurge du refus de la SSJB et reproche au conseil d’administration de « s’octroyer des pouvoirs qui ne sont pas conformes à ses règlements ». Il convient que certaines demandes d’adhésion sont peut-être incomplètes, mais estime que l’organisme n’aurait dû rejeter que celles-là.
Il rappelle qu’il a lui-même obtenu sa carte de membre sans autre forme de procès en 2016 et que dans la lettre de renouvellement de cette carte, en janvier 2017, on l’invite à recruter des membres. « Pour inscrire de nouveaux membres, y détaille-t-on, veuillez simplement remplir un formulaire supplémentaire pour cette personne. Il nous fait toujours plaisir d’accueillir de nouveaux membres. »
« On veut juste collaborer alors que l’autre côté ils se braquent. Nous on se questionne et leur silence est assourdissant. C’est vraiment inquiétant », réagit M. Boucher.
Pas de commentaires
Puisque l’affaire se retrouve désormais entre les mains des avocats, la présidente de la SSJB Micheline Dupuis a préféré ne pas commenter.
« Ça prend une orientation qu’on n’avait pas vue venir. Maintenant ça va se discuter entre avocats », a-t-elle déclaré à La Tribune.
Quant aux 13 autres demandes de membrariat qui ont été déposées par le directeur général de la Société nationale de l’Estrie (SNE), Richard Vachon, le 8 mai dernier, le conseil d’administration de la SSJB n’a pas encore statué, précise toutefois Mme Dupuis.
Étienne-Alexis Boucher a lancé cette campagne de recrutement dans l’espoir, dit-il, de relancer la SSJB du diocèse de Sherbrooke, « qui a déjà rayonné dans la région et qui n’est plus que l’ombre d’elle-même ». Le président de la SNE souhaite établir une collaboration entre les deux organismes qui poursuivent les mêmes objectifs de promotion de la culture, de l’histoire et de la langue au Québec. Il nie toute intention politique ou de prise de contrôle mais il questionne la gouvernance de l’organisme.
« On serait satisfait de les voir simplement accueillir de nouveaux membres, comme le prévoient leurs règlements et statuts », assure-t-il, en n’écartant pas l’idée d’intenter des recours devant les tribunaux pour arriver à ses fins.
Journée des patriotes
- Boucher précise en terminant qu’avec un groupe de membres rejetés par la SSJB, il organise un dîner aux hot-dogs, lundi, pour souligner la Journée nationale des patriotes. L’événement aura lieu à compter de 11 h 30, au parc Champs-de-Mars, en face des locaux de la SSJB sur le boulevard Queen-Victoria.
Marcel Bureau donne son appui à Étienne-Alexis Boucher
Directeur général de la Société Saint-Jean-Baptiste du diocèse de Sherbrooke pendant 60 ans, jusqu’en 2014, Marcel Bureau voit d’un bon oeil la mission que s’est donnée Étienne-Alexis Boucher.
« Il est venu me rencontrer mardi et je l’appuie dans ses démarches. Il a l’air de vouloir réanimer la Société et j’en suis heureux. Je lui souhaite bien du succès », déclare M. Bureau en prenant soin d’ajouter qu’il pense avoir bien administré l’organisme durant ces six décennies et l’avoir laissé en bon ordre au moment de partir à la retraite à l’âge de 88 ans.
L’ex-directeur général se souvient que la SSJB a été de plusieurs combats importants pour la région, notamment au chapitre de la toponymie. Sa plus récente campagne remonte à l’an 2000, alors qu’elle lançait une vaste campagne en faveur du nom de J.-Armand Bombardier pour désigner l’autoroute 55.
Marcel Bureau relate également que le service d’entraide, un service mutuel d’assurance qui constitue aujourd’hui l’essentiel des activités de la SSJB, a été mis sur pied en 1941 pour assurer un revenu à l’organisme. « On ne peut pas vivre de cartes de membre à 5 $ », explique-t-il, en précisant que l’initiative sherbrookoise avait été imitée par 17 régions à l’époque.
Sur les 6623 membres que comptait la SSJB en 2016, il est de notoriété que plus de 6500 d’entre eux sont des membres de facto comme bénéficiaires de ce Service d’entraide, ce qui laisse 92 membres actifs à 5 $. L’organisme diocésain fondé en 1939 a déjà compté plus de 22 000 membres, au début des années 70, mais on ignore combien étaient des membres assurés seulement à cette époque-là.
Convenant que le recrutement de membres pour un organisme comme le sien est devenu de plus en plus difficile avec les années, l’ex-directeur général se demande aujourd’hui comment le conseil d’administration peut justifier le rejet de 505 demandes de membrariat.
Il estime que même si cela permettait aux nouveaux membres d’être majoritaires et d’imposer leur vision à l’assemblée générale, cela n’offusquerait pas les membres assurés de la SSJB.
Même si cette vision est plus souverainiste qu’apolitique, si on en croit les craintes des dirigeants actuels de la SSJB? « Qu’est-ce qu’il y aurait de mal à ça? » réplique M. Bureau.
« Avec leur contribution, les membres assurés nous ont permis de mener certains combats et d’honorer des personnalités de la région et nous les en remercions, reprend-il. Maintenant est-ce qu’ils sont souverainistes? Est-ce qu’ils ont peur qu’on devienne un pays? Je ne pense pas que ça change quoi que soit pour eux. »