Adoption de la Loi 22 – 1974

La loi sur la langue officielle du Québec, mieux connue sous le nom de Loi 22, a été fortement critiquée tant dans les milieux nationalistes québécois que chez les anglophones et les groupes ethniques.  Mais pourquoi donc?  

  1. Le remplacement de la loi 63  

Revenons en arrière, soit cinq ans plus tôt alors que le gouvernement de l’Union Nationale avait fait voter la loi 63.  Cette dernière loi avait pour objectif de promouvoir la langue française, mais dans les faits, elle laissait le libre-choix de la langue d’enseignement, menaçant ainsi la décroissance du français au Québec, car les immigrants envoyaient majoritairement leurs enfants dans les écoles anglaises.  Aux élections de 1970, l’insatisfaction face à l’Union Nationale provoqua sa défaite, et le Parti Libéral, dirigé par Robert Bourassa, misa sur l’abrogation de la loi 63 et l’adoption d’une nouvelle loi qui s’appuierait sur les recommandations de la Commission Gendron qu’il mit en place. 

  1. Faire face aux différents lobbies 

La Commission Gendron qui devait se pencher entre autres sur les moyens de renforcer davantage l’usage du français, nettement en déclin en particulier sur l’Ile de Montréal, proposa en fait des aménagements qui n’ont pas satisfaits les tenants des deux camps.  Le lobby des grands patrons anglophones avaient même sévèrement averti le Premier Ministre Bourassa de ne pas trop modifier la loi 63, au risque de voir disparaître quantité de sièges sociaux au profit de l’Ontario.  Quant au lobby des groupes anglophones et allophones, il revendiquait le droit de vivre en anglais comme l’avait prévu l’Acte de l’Amérique du Nord Britannique en 1867.  Les groupes nationalistes souhaitaient quant à eux, que les enfants des immigrants qui venaient s’installer au Québec,  fréquentent les écoles francophones.

  1. Comment concilier les oppositions?

Comment le gouvernement libéral allait-il légiférer dans ce contexte conflictuel?

Il fait adopter la loi 22 dont le préambule indiquait clairement l’intention du gouvernement de préserver et de rendre prééminente la langue française au Québec parce qu’elle fait partie de notre patrimoine national. Le français étant la langue parlée par la majorité des citoyens au Québec, est nettement minoritaire dans le reste du Canada.  De plus, les statistiques montrent le déclin du français sur l’Ile de Montréal.  Alors, comment protéger l’usage du français tout en permettant aux anglophones et aux allophones de continuer à exercer leur libre-choix de la langue d’enseignement?  La loi ne satisfait ni les uns ni les autres, chacun campant dans son coin, mettant le gouvernement à rude épreuve.  Les articles de la loi stipulaient qu’il y aurait des tests de connaissance de l’anglais pour les élèves qui souhaitaient fréquenter l’école anglaise, et qu’il y aurait, dans les écoles francophones des cours d’anglais tant au primaire qu’au secondaire.  

  1. L’annonce d’une élection surprise

Les dispositions de la loi 22 ne convainquirent personne du bien-fondé des changements apportés.  Aussi, le Premier Ministre abrogea la session parlementaire et déclencha des élections qui se tinrent le 15 novembre 1976.

La grogne fut telle qu’elle provoqua la défaite du Parti Libéral et permit l’élection surprise du Parti Québécois qui avait fait campagne pour l’abrogation de la loi 22 et d’en faire adopter une qui serait plus compatible avec la protection de l’usage du français au Québec.

 

Luc Guay, Ph.D
Professeur retraité de l’Université de Sherbrooke

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3e trimestre 2024, Régime canadien