Création d’Hydro-Québec – 1944

L’histoire d’Hydro-Québec est unique à bien des égards. Cette société d’État québécoise a un rayonnement qui dépasse largement le territoire québécois. Non seulement celle-ci produit plus de 40% de l’hydro-électricité au Canada, mais elle se classe comme le quatrième producteur hydroélectrique du monde. Mais sa mission ne se limite pas simplement à produire de l’électricité, elle est aussi innovatrice dans le transport et la distribution de l’électricité au Québec, tout en étant un important exportateur d’énergie vers le nord-est des États-Unis. 

  1. Avant Hydro-Québec

Dès 1901, la compagnie privée Montreal Light, Heat & Power Company (MLH & P) fut créée afin de distribuer l’électricité à Montréal et dans ses alentours. Durant les années 1920, la MLH & P  engrangeait déjà de larges bénéfices. Entre-temps, les Québécois payaient l’électricité deux plus chers qu’en Ontario qui contrôlait sa production depuis 1907.                                                                                     

Durant les années 1930, dans la foulée de la grande dépression, la MLH & P fit l’acquisition de nombreuses sociétés hydroélectriques autour de Montréal, dont la Beauharnois Power Company. En plus de posséder trois centrales hydroélectriques, elle en exploitait une quatrième en collaboration avec la Shawinigan Water and Power. C’est dans ce contexte-là que la Commission Lapointe recommanda en 1935 la création d’une Commission électrique pour réglementer la distribution de l’électricité et les tarifs. Mais le gouvernement de Maurice Duplessis se limita à adopter une loi favorisant simplement un contrôle municipal sur le service électrique. 

  1. Nationalisation et grands chantiers

Mais entre-temps, les partisans de la création d’un service public hydroélectrique se montrèrent plus combatifs. En plus de protester contre les coûts élevés de l’électricité, ils déploraient aussi l’absence d’une véritable politique d’électrification des campagnes. Plus encore, ils s’insurgeaient sur le manque de francophones dans les postes de direction des sociétés hydroélectriques de la province. C’est dans ce contexte-là que le gouvernement d’Adélard Godbout adopta une loi en avril 1944 créant la Société d’Hydro-Québec. Dans la foulée de la loi de 1944, la MLH & P fut nationalisée, ainsi que sa filiale Beauharnois Power. En plus de gérer ces entreprises, Hydro-Québec s’attela à l’électrification des campagnes.

L’élection de l’Union nationale d’août 1944 porta un dur coup pour Hydro-Québec. En effet, Maurice Duplessis était opposé à toute forme d’intervention gouvernementale dans l’économie. S’il empêcha une plus grande expansion d’Hydro-Québec dans la distribution de l’électricité, il permit tout de même à la nouvelle société de lancer de grands projets de construction de barrages, dont les Centrales Bersimis-1 et 2 achevées en 1959 et la Centrale de Carillon. Ce faisant Hydro-Québec put multiplier par six sa capacité de production tout en réduisant de moitié les tarifs d’électricité résidentiels dans la région de Montréal. En 1960, Hydro-Québec produisait 49% de toute l’hydroélectricité au Canada et était devenu le plus grand producteur d’électricité par habitant au pays.  Hydro-Québec développa durant les années 1950 une expertise unique dans la construction de barrage et le transport de l’électricité.

  1. Hydro-Québec fer de lance de la modernisation du Québec

L’élection du gouvernement libéral de Jean Lesage en 1960 marqua le début de la Révolution tranquille qui allait lancer le Québec dans une grande phase de modernisation. Hydro-Québec devint un des symboles du Québec moderne. Faisant suite à l’élection anticipée de 1962, le gouvernement Lesage sous l’impulsion de son ministre des Ressources naturelles, René Lévesque,  nationalisa les grandes compagnies de production et de distribution privées, ainsi que les quelques 45 coopératives rurales.  Hydro-Québec allait dorénavant pouvoir se lancer dans des projets titanesques qui allaient pour un temps émerveiller le monde. 

 

Gilles Vandal, Ph.D
Professeur émérite de l’Université de Sherbrooke

Category
— 2e trimestre 2024, Régime canadien