La Révolution tranquille des années 1960 avait favorisé le développement socioéconomique du Québec. Mais elle s’est heurtée en octobre 1970 à une crise sociopolitique qui marqua les esprits pendant plusieurs décennies : la Crise d’octobre.
Rappelons les faits. Le Front de libération du Québec (le FLQ), mouvement créé en 1963 prônant l’indépendance du Québec ainsi que la fin de l’exploitation ouvrière des « Canadiens-français » par l’élite anglophone du monde des affaires, fait entendre crument ses revendications. Les membres les plus radicaux posent des bombes faisant sauter des statues, des boites aux lettres, braquent des banques, et volent de la dynamite. La crise s’intensifia le 5 octobre lorsque des membres de deux « cellules » procèdent à l’enlèvement du diplomate britannique James Richard Cross puis, cinq jours plus tard, à celui du ministre du Travail, Pierre Laporte. Suite à l’enlèvement de monsieur Cross, le FLQ obligea la station de télévision de Radio-Canada à lire un manifeste qui résumait les revendications de ce mouvement qui fut qualifié de terroriste par la classe politique, étant donné la nature de ses actions violentes. Jugeant la situation très préoccupante, le premier ministre du Québec, Robert Bourassa ainsi que le maire de Montréal, Jean Drapeau, demandèrent au premier ministre canadien, Pierre Elliot Trudeau, d’intervenir dans cette crise. C’est alors que M. Trudeau fit proclamer, le 16 octobre, la Loi des mesures de guerre arguant que ces enlèvements avaient pour objectif de renverser le gouvernement du Québec. Quelques heures plus tard, le Québec fut secoué d’apprendre le décès du ministre Laporte dont le corps fut retrouvé dans le coffre arrière d’une auto, à l’aéroport de Saint-Hubert, sur la rive sud de Montréal. Les forces policières ratissent la ville de Montréal pour retrouver les ravisseurs, profitant de la suspension des libertés civiles promues par cette Loi des mesures de guerre. Ainsi, 457 personnes soupçonnées d’appartenir au FLQ ou ayant manifesté des sympathies avec le FLQ sont arrêtées et emprisonnées sans jugements. Ce n’est que le 3 décembre qu’un groupe de cinq felquistes accepta l’exil vers Cuba promis par le gouvernement canadien en échange de la libération de James Cross. Ils y resteront pendant quatre ans. Quant aux ravisseurs de Pierre Laporte (les frères Paul et Jacques Rose ainsi que Francis Simard), ils furent arrêtés le 28 décembre : ils furent jugés et condamnés à la prison à vie, puis furent libérés sous condition en 1982.
L’adoption et l’application de la Loi des mesures de guerre suspendant les libertés civiles pour une période de six mois furent condamnées par les défenseurs des droits et libertés civiles. Que retenir de cette crise ? Le Québec fut terriblement troublé durant cette crise sociopolitique, alors que dans une vaste proportion, les Québécoises et les Québécois, se sont opposés à l’utilisation de la violence pour faire valoir des droits politiques pourtant légitimes. Par exemple, le Parti Québécois, alors dirigé par René Lévesque, et qui prônait aussi la souveraineté du Québec, se dissocia de ces actes terroristes.
Luc Guay, Ph. D, didactique de l’histoire
Professeur retraité de l’Université de Sherbrooke