Tsawenhohoui, de son nom de baptême Nicolas Vincent, est un chef Huron inspirant dans l’histoire du Québec.
Une seigneurie au cœur d’un long conflit
Né à Wendake (Loretteville) le 11 avril 1769, il devint grand chef des Hurons en 1811, titre qu’il portera jusqu’à sa mort en 1844. Il a revendiqué, tout au long de son mandat, la rétrocession de la seigneurie de Sillery. Cette seigneurie avait été accordée aux Hurons en 1651 par Louis XIV. Il la remit aux Jésuites en 1699, ceux-là mêmes qui avaient été, jusque là, les tuteurs des Hurons dans cette affaire…
Près d’un siècle plus tard, soit en 1763, un nouveau coup de théâtre fit grand bruit, soit la capitulation de la Nouvelle-France aux mains des Britanniques, obligeant entre autres les Jésuites à quitter la colonie. Nouvelle tentative des Hurons pour reprendre leur « dû », mais encore une fois, en vain, la Couronne britannique s’y opposant!
Un chef tenace et persévérant
C’est à partir de 1819 que des tentatives plus importantes furent entreprises par le grand chef Tsawenhohoui pour récupérer la seigneurie de Sillery auprès de la Chambre d’assemblée du Bas-Canada, composée comme on le sait en majorité de députés « canadiens », et qui avait donné son aval à cette rétrocession. Le grand chef ne put cependant compter sur les gouverneurs, qui s’opposaient à cette rétrocession, et qui utilisèrent encore une fois leur droit de véto contre les résolutions de la Chambre d’assemblée sur cette question. Soulignons que Tsawenhohoui a été le premier autochtone à s’adresser à la Chambre d’assemblée du Bas-Canada en 1819.
Sans se décourager, le leadeur autochtone proposa alors une autre stratégie, beaucoup plus impressionnante : accompagné de trois chefs hurons, il se rendit à Londres en 1825 pour y rencontrer rien de moins que le roi George IV! Les représentants hurons séjournèrent quatre mois à Londres, tentant de persuader ministres, députés et conseillers politiques britanniques afin d’obtenir une audience auprès de Sa Majesté, ce qu’ils réussirent à obtenir. Le roi les écouta avec grand intérêt, lit-on dans les journaux londoniens, mais sans leur promettre la rétrocession de ladite seigneurie.
Quelques années plus tard, le roi Guillaume IV remit en 1831, tous les biens des Jésuites, qui jusque là avaient été la propriété de la Couronne, au gouvernement du Bas-Canada. À plusieurs reprises, Tsawenhohoui se rendit encore et encore à la Chambre d’assemblée du Bas-Canada, implorant les députés d’accepter la rétrocession de la seigneurie de Sillery aux Hurons, et chaque fois, le véto des gouverneurs l’emporta sur les votes des députés.
Tsawenhohoui décéda le 2 novembre 1844 à l’âge de 75 ans. Il fut l’un des derniers grands chefs hurons héréditaires puisque le processus du choix du grand chef changea avec l’avènement du principe électif dans les années 1880.
Luc Guay, Ph.D, professeur retraité de l’Université de Sherbrooke