Botaniste, professeur et écrivain, le Frère Marie Victorin a marqué le paysage scientifique du Québec par ses nombreuses réalisations.
- Une passion dévorante pour la botanique
Natif de Kingsey Falls situé dans la région du Centre-du-Québec, Conrad Kirouac prix le nom de Frère Marie Victorin lorsqu’il entra dans la congrégation des Frères des Écoles chrétiennes, et ce, dès l’âge de 16 ans. Affecté par la tuberculose, c’est durant sa convalescence que s’est développée sa passion pour la botanique : la lecture de l’ouvrage La flore canadienne (1862) de l’abbé Léon Provencher, fondateur du journal Le Naturaliste canadien (1868), le guida durant toute sa carrière.
- Une carrière prolifique
Nommé professeur de botanique à l’Université de Montréal en 1920, il s’employa à fonder l’Institut botanique de cette Université et à cofonder l’ACFAS (l’Association canadienne-française pour l’avancement des sciences) en 1923.
Il est vite reconnu pour ses travaux scientifiques recevant le prix David en 1923 et en 1931, soulignant les meilleurs travaux scientifiques, l’année même où il fonda le Jardin botanique de Montréal.
Son œuvre, la Flore laurentienne publiée en 1935 est encore de nos jours un ouvrage de référence en botanique : ses expériences et ses travaux sur le terrain l’ont mené, année après année, à produire un herbier considéré comme l’un des plus riches en Amérique du Nord!
- Une carrière scientifique difficile à gérer pour un religieux
Toutes ces reconnaissances n’ont pas été faciles à gérer par le Frère Marie Victorin alors que certains de ses confrères religieux critiquaient son exposition jugée trop publique, ce qui le blessa profondément, lui qui souhaitait remettre en question certaines traditions tant universitaires qu’ecclésiastiques. Même la création du Jardin Botanique de Montréal a été menacée de ne pas voir le jour étant donné les luttes qu’il a dû mener contre les politiques de certains bureaucrates et politiciens qui jugeaient le projet trop onéreux. Il aura fallu une décennie de pourparlers pour en arriver à sa réalisation. Sa persévérance a porté fruit!
- Des amitiés réconfortantes
La correspondance qu’il a tenue avec Marcelle Gauvreau lui a été salutaire car elle a permis aux deux correspondants d’explorer des perspectives scientifiques permettant de consolider les connaissances construites durant ces dix années d’écriture à deux (de 1933 à 1944). Entre autres perspectives, il y avait celle de la sexualité, celle des plantes, des fleurs et même les rapports intimes entre les humains. Le Frère Marie Victorin s’intéressait à l’anatomie féminine, les menstruations, les périodes de fécondité et les relations sexuelles…thématiques qui, à cette époque, étaient taboues, non seulement du côté des religieux et des religieuses, mais aussi du côté des citoyens en général. Il souhaitait que l’éducation sexuelle soit enseignée dans les écoles.
Il faut aussi souligner la correspondance qu’il a entretenu avec l’abbé Léon qui s’est étendue de 1907 à 1944 sur des questions reliées à la botanique et qui a contribué à l’avancement de leurs travaux en botanique. Ils ont pu partager des spécimens de plantes locales et procéder à une classification des espèces.
Son décès est survenu le 15 juillet 1944 à l’âge de 59 ans lors d’un accident d’auto au retour d’une excursion botanique à Black Lake. La mort de cet éminent botaniste créa une onde de choc tant dans la communauté scientifique que dans la population.
Luc Guay, Ph.D
Professeur retraité de l’Université de Sherbrooke