Décès d’Honoré Mercier – 1894

Honoré Mercier naît le 15 octobre 1840 d’une famille de cultivateurs établis à Saint-Athanase (Iberville).  Son père, un ardent admirateur de Papineau, milita en faveur des idées libérales promues par le parti Patriote, ce qui influencera le jeune Mercier dans sa carrière de journaliste puis de député et de Premier ministre de la province de Québec de 1887 à 1891.  

 

  1. Adepte du régime républicain

Honoré Mercier est reconnu pour ses idées républicaines et contre le type de gouvernance impériale promue par les partisans de la Confédération canadienne dont John A. MacDonald et George-Étienne Cartier.  D’ailleurs, dès 1864, il fait valoir que cette union de quatre « provinces » pour former le Dominion du Canada rendrait les Canadiens-français minoritaires et affaiblirait leur poids politique.

 

  1. Fondation du Parti National : phase 1

En 1870, il participe à la fondation d’un nouveau parti politique, le Parti National qui a pour objectif de réunir Libéraux et Conservateurs qui affichent des valeurs patriotiques en plaçant « l’intérêt national au-dessus de celui du parti ».  Tout un programme!

Il est élu en 1872 comme député fédéral sous cette bannière et ose prendre la défense des droits des minorités francophones du Nouveau-Brunswick d’avoir des écoles francophones financées par le gouvernement. Peine perdue car ni Ottawa, ni Londres ne voudront soutenir les Acadiens dans leurs revendications qui étaient pourtant protégées par la Constitution de 1867 (article 93).   Cette querelle des écoles va fortifier ses positions autonomistes.  Aux élections de 1874, il se retire de la politique pour retourner à son cabinet d’avocat jusqu’à ce qu’il reçoive l’appel du Premier Ministre libéral Joly l’invitant à faire partie de son équipe de ministres. L’année suivante, le gouvernement étant minoritaire, est renversé.  

 

  1. Le Parti National : phase 2

Mercier souhaite ranimer le projet d’une grande coalition entre Libéraux et Conservateurs à Québec, mais le projet n’aboutit pas pour l’instant :  il lui faudra attendre jusqu’en 1883 pour voir son idéal se réaliser alors qu’il est nommé chef du Parti Libéral.  L’exécution de Louis Riel en 1885, chef des Métis de l’Ouest, lui donne l’occasion de critiquer vertement le gouvernement MacDonald et de prononcer des discours qui lui donneront l’appui des francophones.  Il réussit à persuader les Conservateurs dissidents à joindre le Parti National, lui permettant de remporter les élections de 1886 et devenir Premier ministre dès janvier 1887.

Sous son administration, il organise la première conférence interprovinciale où il critique la position centralisatrice du gouvernement fédéral, s’opposant entre autres, au droit de véto du gouvernement fédéral sur les lois votées par les provinces. 

Il crée aussi le ministère de la Colonisation et avec l’aide du curé Labelle qu’il nomme au poste de sous-ministre, il entreprend le développement des régions situées au nord du fleuve saint-Laurent permettant ainsi de réduire l’émigration de dizaines de milliers de Québécois vers les usines des États-Unis. 

L’éducation est un autre chantier sur lequel il travaille en finançant les écoles pour les élèves et les écoles du soir pour les ouvriers et les ouvrières.

Enfin, il développe le réseau de chemins de fer afin de favoriser le commerce tant avec les États-Unis qu’avec les autres provinces du Canada.  

 

  1. Le scandale de la Baie des Chaleurs

Et c’est justement ce développement du réseau de chemins de fer qui le coulera : son ami et trésorier du Parti libéral, Ernest Pacaud empocha la somme de 100 000 $ sur les 175 000$ qui devait être versée à l’entrepreneur de la compagnie de la Baie des Chaleurs afin d’accélérer les travaux de construction.  Une enquête est menée, Pacaud est accusé, et par la bande, Mercier aussi, même s’il a toujours crié son innocence dans ce scandale.  La presse conservatrice s’empare de l’affaire, et le lieutenant-gouverneur le révoque, appelant le chef de l’opposition à le remplacer. Des élections sont déclenchées en mars 1892 et sont remportées par Boucherville. Toutefois, en novembre de la même année, Pacaud et Mercier sont déclarés innocents, mais le mal était fait.  Mercier prononce un discours-choc en 1893 au parc Sohmer de Montréal où il critique l’Acte d’Union (1840) et l’Acte de l’Amérique du Nord Britannique (1867) qui avait, selon lui l’objectif d’assimiler les Canadiens-français dans l’ensemble anglais;  il proposa même l’indépendance du Canada face à la Grande-Bretagne et d’accorder une pleine autonomie aux provinces comme celles détenues par les États américains. 

Il meurt du diabète le 30 octobre 1894 après avoir déclaré faillite.  Et malgré le scandale dont il a été la cible, 25 000 personnes ont assisté à ses funérailles à Montréal, illustrant sa très grande popularité auprès des citoyens du Québec.

 

Luc Guay, Ph.D
Professeur retraité de l’Université de Sherbrooke

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4e trimestre 2024, Régime canadien