Naissance de Félix Leclerc – 1914

Félix Leclerc est considéré à juste titre comme un des plus grands bâtisseurs de la culture québécoise. Ce célèbre auteur-compositeur-interprète fut à la fois poète, romancier, activiste et acteur. Né à La Tuque en 1914, il décéda à l’île d’Orléans en 1988. En près de 60 ans de carrière, il légua une œuvre contenant pas moins de 146 compositions originales. Ce catalogue impressionnant contribua grandement à façonner  notre identité nationale pour nous faire ainsi abandonner l’épithète de Canadiens-français pour celui de Québécois.

 

Contraint d’abandonner ses études à l’Université d’Ottawa à cause de la Grande Dépression, il occupe plusieurs emplois avant de devenir animateur-radio à Québec et à Trois-Rivières entre 1934 et 1937.  Entre 1939 et 1950, il travaille à Radio-Canada comme écrivain, développant des scénarios de dramatiques radiophoniques. C’est à cette époque qu’il compose et interprète ses premières chansons. Il joue également dans plusieurs séries dramatiques radiophoniques, dont « Un homme et son péché » de Claude-Henri Grignon et « Vie de famille » d’Henri Deyglun. Il fonde en outre une compagnie de théâtre et présente des spectacles partout au Québec. Parallèlement, il se produit sur scène avec les Compagnons de Saint-Laurent d’Émile Legault en 1942 et 1945.

 

Durant les années 1940, il publie des recueils de contes (Adagio), de fables (Allegro) et des poèmes (Andante) qui s’avèrent des succès de librairies. Puis en 1948, il fonde, avec Guy Mauffette et Yves Vien, la troupe VLM comme véhicule pour présenter ses pièces « Le P’tit Bonheur » et « La P’tite Misère » partout au Québec. Parallèlement, sa pièce « La Caverne des splendeurs » remporte en 1948 le premier prix d’un concours de pièces en un acte organisé par les Amis de l’art. Entre-temps, plusieurs de ses chansons, dont « Le P’tit Bonheur », « Hymne au printemps », « Le Train du Nord » et « Bozo » sont largement popularisées au Québec par l’entremise de Radio-Canada à la fin des années 1940.

 

En 1950, sa carrière internationale prend son envol, alors qu’il est invité en France par l’influent impresario Jacques Canetti. Il partage aussi l’affiche avec les Compagnons de la chanson et Édith Piaf. Portant une chemise de bûcheron à carreaux et s’accompagnant à la guitare, il devient un artiste de premier plan avec ses chansons terreuses. Canetti lui ouvre la porte pour ses premiers enregistrements chez Polydor Records. Il obtient en février 1951 le Grand prix du disque de l’Académie Charles-Cros à Paris pour sa chanson « Moi, mes souliers ». Il poursuit ensuite sa tournée en France, en Belgique et en Suisse où il multiplie ses apparitions dans de grandes émissions de radio, les plus grands théâtres de variétés et boîtes à chansons comme les Trois-Baudets. Son séjour européen en a fait une superstar de la chanson française. 

 

De retour au Québec en 1953, il participe à de nombreuses tournées. Néanmoins, il obtient son plus grand triomphe lors de sa prestation avec Gilles Vigneault et Robert Charlebois à la Superfrancofête de 1974 à Québec. Il continue de publier jusque dans les années 1980 des chansons, des poèmes, des romans et des pièces de théâtre. 

 

La crise d’octobre de 1970 le fit basculer ouvertement vers la défense de son peuple. Sa réplique à cette crise exprime à la fois un dégoût et de la colère face à ce qu’il perçoit comme une tentative progressive du gouvernement fédéral d’éroder la culture québécoise au Canada. Refusant de rester à l’écart, ses écrits et chansons devinrent plus ouvertement politiques et plus empreintes d’une ferveur nationaliste. Révolté par cette injustice nationale, il écrivit en moins de 24 heures en 1970 « L’alouette en colère », une chanson qui résonne encore aujourd’hui.

 

Félix Leclerc fut le premier artiste québécois à connaître un succès international. Les pays francophones ont souligné la qualité de son travail en lui décernant une multitude de récompenses et d’honneurs. L’Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo, créa en son honneur le prix Félix en 1979 qui est remis chaque année à l’artiste québécois le plus méritant. En plus d’être fait Officier de l’Ordre du Canada, Grand Officier de l’Ordre national du Québec et Chevalier de la Légion d’honneur de France, il a été intronisé en 2003 à titre posthume au Temple de la renommée des auteurs et compositeurs canadiens. À l’occasion du 100e anniversaire de sa naissance, le gouvernement du Québec l’a désigné « personnage historique » en 2014.

 

Gilles Vandal, Ph.D
Professeur émérite de l’Université de Sherbrooke

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3e trimestre 2024, Régime canadien